L'histoire :
Après avoir affronté durant deux jours une terrible tempête en mer, Raul profite enfin d’une accalmie pour trouver le repos sur une île tellement petite qu’elle ne figure sur aucune carte. Alors qu’il longe le long quai blanc qui s’en détache, un jeune homme l’aide à amarrer, puis s’enfuit en courant en direction de l’unique habitation. Une fois à terre, Raul découvre cet étrange et interminable quai, surmonté d’un haut mur tout aussi long, couvert de graffitis. Au milieu de l’île, un rocher est surmonté d’un phare désaffecté. A son pied, est plantée une auberge tenue par Sara et son fils Dimas, qui a aidé Raul à accoster. Fort aimable, Sara lui prépare le dîner et lui donne une chambre. Le lendemain, Raul s’aperçoit que de l’autre côté du quai, est amarré un second voilier. Intrigué, il finit par faire la connaissance d’Ana, propriétaire de l’embarcation. Discrète, cultivée et sauvage, la jeune femme semble attendre quelqu’un. Envoûté, Raul se met en tête de la séduire. Mais il déchante rapidement et se retrouve à faire copain-copain avec un goéland…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dès les premières planches, Miguelanxo Prado (Chroniques absurdes, Chienne de vie) installe le lecteur dans un rythme lent et mystérieux. Tout est étrange dans cette histoire. Que font seuls une femme et son fils sur un îlot aussi minuscule ? Qu’est-ce qu’Ana attend exactement ? Pourquoi cette île est-elle pourvue d’un mur si absurdement long, comme un trait de craie au milieu de l’océan ? Tout cela est-il bien réel ? Chargé de superstitions et de mystères, ce récit se veut emprunt de l’œuvre de l’écrivain argentin Jorge Luis Borgès, qui niait l’évidence d’un réel fiable, unique et stable. La logique y est avant tout symbolique, puis fantastique, tout en restant constamment lyrique. Car même si le ressort final s’appuie sur un paradoxe temporel, l’ambiance générale demeure plus onirique que réellement fantastique. En outre, le dessin de Prado est superbe, fait de touches impressionnistes et de lumières savamment orchestrées, en parfait accord avec la poésie qui se dégage du récit. L’hommage de Prado est ici à la hauteur de la pensée de l’écrivain. Une bonne idée donc, que de rééditer cet album plusieurs fois primé.