parution 01 février 2018  éditeur le Tripode  Public adulte  Mots clés Guerre / Roman graphique

La Mère et la Mort / Le Départ

En illustrant deux petites fables argentines sur le thème de la mort et plus particulièrement la perte d'un enfant, Alberto Chimal, Alberto Laiseca et Nicolás Arispe nous plongent dans un roman graphique philosophique noir et pesant.


La Mère et la Mort / Le Départ, bd chez le Tripode de Chimal, Laiseca, Arispé
  • Notre note Yellow Star Yellow Star Yellow Star Grey Star

    CHEF D'ŒUVRE   Green Star Green Star Green Star Green Star

    TRÈS BON   Green Star Green Star Green Star Dark Star

    BON   Green Star Green Star Dark Star Dark Star

    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • Scénario Yellow Star Yellow Star Grey Star Grey Star

    CHEF D'ŒUVRE   Green Star Green Star Green Star Green Star

    TRÈS BON   Green Star Green Star Green Star Dark Star

    BON   Green Star Green Star Dark Star Dark Star

    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • dessin Yellow Star Yellow Star Yellow Star Grey Star

    CHEF D'ŒUVRE   Green Star Green Star Green Star Green Star

    TRÈS BON   Green Star Green Star Green Star Dark Star

    BON   Green Star Green Star Dark Star Dark Star

    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

©le Tripode édition 2018

L'histoire :

Dans la première histoire La mère et la mort, la mère, une renarde, vaque à ses occupations dans son vieux chalet au bord du Rhin. La mort ayant traversé les éléments se présente à sa porte pour lui arracher son enfant. Bien évidemment, la mort le sait bien, aucune mère ne laisserait son enfant être emporté sans dire mot. Elle pose ses mains squelettiques sur le visage de la renarde et l'endort instantanément. La mort prend l'enfant et s'enfuit. En se présentant devant les éléments, que ce soit le fleuve, la forêt ou la montagne, ces derniers laissent passer la mort en déplaçant tous les obstacles, car ils savent qu'en un seul instant, elle peut les anéantir. La mère renarde se réveille et se rend compte avec stupeur que son petit avait disparu. Elle se lance à sa recherche et se retrouve face aux éléments. La renarde demande le passage, mais le fleuve est beaucoup moins clément qu'avec la mort et lui demande ses yeux pour laisser libre le passage. Jusqu'où cette mère est-elle prête à aller pour sauver son enfant ? En retournant l'album, la seconde histoire, Le départ, commence après un tremblement de terre où une mère pleure son enfant décédé sous les décombres. Elle implore les dieux de lui rendre la vie. Ces derniers, un peu taquins, acceptent de rendre son âme au chérubin mais ne le guérissent pas. L'enfant est condamné à souffrir ad vitam aeternam. Jusqu'à quel point cette mère sera capable de supporter la souffrance de son enfant ?

Ce qu'on en pense sur la planète BD :

Outch ! C'est l'interjection qui colle le mieux au ressenti du lecteur à la fin de cet album. Il faut plusieurs minutes pour que l'amateur de bande dessinée, renvoyé sans ménagement dans les cordes, se remette de ses émotions. Le sujet tournant autour de la mort et de la perte d'un enfant est lourd. Evidemment, la perte d'un être cher, qui plus est de son enfant, est une des épreuves les plus dures de la vie. Les parents ne s'imaginent pas perdre un enfant car dans l'esprit commun, ce n'est pas dans l'ordre des choses. Les deux petites fables que nous proposent Alberto Chimal et Alberto Laiseca sont dures. Les mots utilisés sont fort, surprennent parfois, voire choquent le chaste lecteur peu habitué à la dureté du sujet et à la rudesse des mots utilisés par les auteurs. Le rythme de lecture est différent d'un album traditionnel, car une planche complète est accompagnée au maximum d'une ou deux phrases de la fable. Les illustrations sont en adéquation avec le texte et la symbolique de chaque planche peut être détaillée et décortiquée à souhait. Comme par exemple la représentation de la mort. Le courant Freudien s'accorde sur le terme de « néantité absolue » pour définir la représentabilité de la mort. Cependant, depuis l'antiquité, l'homme, à besoin de la représenter, de lui donner une conscience et un sens. Peut-être pour éluder la fatalité qui accompagne son action. Dans l'histoire La mère et la mort, cette dernière est représentée en habit de combattant de 14/18. Cette représentation peu conventionnelle est largement compréhensible à la vue du nombre de morts des deux camps dans cette guerre. Pour continuer sur la symbolique, la seconde histoire Le départ souligne une vision plus ancienne des esprits et des dieux, celle d'une entité ou une force supérieure qui joue avec les hommes jusqu'à s'accorder le droit de vie ou de mort. Nicolás Arispe dessine par petites touches une multitude de traits extrêmement maîtrisés qui donnent un bel aspect du relief et de beaux ombrages. Les planches sont très travaillées et détaillées jusque dans les moindres recoins. Le travail de l'auteur est titanesque. Jetez un œil à la double page centrale qui sert de « pont » entre les deux histoires. L'effet de miroir est juste remarquable. Cet album qui possède plusieurs niveaux de compréhension est artistiquement beau et bien ficelé. Il ouvre la porte à de longues interprétations et discussions. Un ouvrage peu commun dans l'univers de la bande dessinée, qui mérite qu'on s'y attarde. Que vous aimiez ce style ou non, une chose est sûre, ce livre ne vous laissera pas indifférent.

voir la fiche officielle ISBN 9782370551481