L'histoire :
Depuis plusieurs heures, Susan tente de joindre sa mère par téléphone… et l’absence de réponse l’inquiète. Il faut dire que Denise vit depuis plusieurs années à Londres, tandis que sa mère, âge de 91 ans, habite toujours dans leur vieille maison de Cedar Rapids (Iowa), dans le middle west américain. Elle vit seule, très isolée dans son train-train quotidien. Susan imagine le pire et contacte la jeune femme des services sociaux – Vermeil services – avec laquelle elle est en relation, pour qu’elle intervienne. Elle fait bien : avec l’intervention d’un policier, ils retrouvent leur maman qui a fait une mauvaise chute et qui est restée « coincée » toute la nuit allongée sur le sol à côté du canapé du salon. Elle est faible mais consciente, avec une fracture de fatigue dans le pubis. Susan redoute la vérité : sa mère souffrirait-elle de démence ? Susan décide aussitôt de faire le voyage pour s’occuper du placement de sa maman. Elle prévoit un séjour d’une semaine maximum. Quand elle atterrit à l’Eastern Iowa Airport, au milieu de la nuit, il fait un temps glacial. Susan se fait conduire en taxi dans sa maison d’enfance. Mais il lui manque une clé pour entrer… Elle commence à croire qu’elle va mourir d’hypothermie sur le perron, quand elle remarque un soupirail du sous-sol entrouvert. Susan se faufile et pénètre ainsi à l’intérieur de cette maison qu’elle connait par cœur…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A travers cet épais roman graphique, l’autrice anglo-américaine Denise Dorrance fait une (quasi) auto-fiction de sa propre expérience, au moment de la dégénérescence de sa maman, authentiquement décédée pendant un confinement du Covid. A travers l’alter-ego de Susan – sans doute une prise de distance nécessaire pour pouvoir légèrement trahir la réalité – elle raconte les deux mois les plus compliqués de sa vie, lorsqu’elle a dû « placer » sa vieille maman atteinte d’Alzheimer dans un institut adapté. L’autrice vit en effet en Angleterre, tandis que sa vieille maman vivait alors aux USA. Le personnage de Susan se retrouve ainsi ici confrontée aux bouleversantes affres de la démence sénile, mais aussi au fonctionnement souvent kafkaïen de l’administration et des établissements de santé. A travers cette histoire intime, traitée tantôt avec gravité, tantôt avec humour, mais toujours avec beaucoup de tendresse, l’autrice met surtout en scène le parcours complexe et psychologiquement lourd des « aidants » confrontés aux maladies neurodégénératives de leurs proches. La rudesse hivernale de l’Iowa donne un titre à double sens : le Blizzard qui accompagne cette période devient la métaphore de la désorientation cognitive de cette vieille dame et de sa mort prochaine. Le mode narratif utilisé par Denise Dorrance, cartoonist méconnue mais expérimentée (elle publie en Grande Bretagne dans The Spectator et The Sunday Times), est proche de celui d’Allison Bechdel ou de Posy Simmonds.