L'histoire :
Dans un avenir très proche. En couple depuis toujours, à l’origine d’une famille épanouie, Camille et Gloria approchent de leurs 80 ans (chacun). Ils vivent dans une grande maison de campagne avec piscine, dans un coin champêtre et escarpé du Finistère, avec vue sur la mer. Ils ont un chien turbulent, qui chasse les lapins parasites dans le jardin potager, sans trop prendre soin des salades de Camille. Ils ont aussi un caisson « éterniseur », dans lequel ils s’immergent de temps en temps, pour se redonne un peu de peps… Mais le modèle est un peu vieillissant, donc il tombe sans cesse en panne. Mais le grand sujet du moment, c’est la prochaine cure de « prolongement » de Gloria. Elle refuse de vieillir et entreprend régulièrement ce genre de traitement, qui fait rajeunir à chaque fois la vie d’une quinzaine d’années… mais qui coûte une blinde. Ces séances de « prolongements » durent en général une semaine, au sein d’un institut moderne sous un dôme géant, et ils sont décriés par les masses populaires qui dénoncent les inégalités bourgeoises. Camille les refuse et accepte plutôt de vieillir normalement. Mais il doit trouver les fonds nécessaires pour la cure de Gloria… et pour cela, il essaie de vendre un bien immobilier, son ancien bistrot de famille, les Trois Mamelles…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le prolongement de la vie… voire l’immortalité, est une vaste quête de l’humanité, depuis les alchimistes. En auteur complet, pour son premier album de BD adulte, Gwendal Le Bec nous propose un système de cures de Prolongement, dans un avenir proche. Des cures hors de prix, donc réservées au riche, donc véhicules d’inégalités sociales, donc conspuées par des manifestations permanentes. Telle est le contexte réjouissant. Et il confronte un couple d’octogénaires à cette « solution », alors même qu’ils n’ont pas le même avis. En effet, Camille préfère vieillir normalement, tandis que sa femme Gloria refuse catégoriquement l’idée de mourir. On suit leur quotidien traversé par cette problématique… et surtout par bien d’autres petits tracas secondaires. Or c’est là que le lecteur peut être frustré. Car cette méthode du prolongement de la vie, qui aurait pu donner lieu à des réflexions philosophiques et éthiques, des débats sociaux ou des intrigues juridiques, reste à la marge. On suit ici les petites histoires ordinaires de la famille, en laissant le cœur du sujet d’anticipation de côté. Sans compter que le traitement graphique au style minimaliste, en bichromie, ne permet pas toujours de distinguer la mère de la fille, voire les deux du personnage principal du soap-opera indien qui passe à la télé et dont est friand Camille. Et ce dessin un peu rough peine aussi à attribuer les rides, les âges, ce qui est plutôt gênant vu le propos central. En somme, on a le sentiment d’une bonne idée de départ, mais insuffisamment exploitée par rapport à son potentiel, dissoute dans les convenances habituelles de la chronique de mœurs.