L'histoire :
Dans un étang au milieu de la jungle, entourée par les animaux sauvages tels les singes ou les toucans, une étrange relique remonte des profondeurs et flotte à la surface. Le lendemain matin, lorsque le soleil se lève, une femme du village la recueille. Elle l'échange contre du maïs à un vendeur, qui lui-même la vend à un aristocrate blanc. Celui-ci la glisse dans une malle, qui est emmenée sur un bateau et qui traverse l'océan. Une jeune femme rousse, nommée Elsie, ouvre cette malle. Elle y découvre tout un tas d'objets exotiques, nouveaux, inconnus. Et elle sort cette relique. Lorsqu'elle la voit, elle la lâche de surprise, et pousse un cri.
Dans un village perdu du Yucatan, un moine dicte à son jardinier les plantations qu'il doit effectuer, et refuse de voir quatre Indiens qui attendent depuis hier devant les grilles de sa paroisse. Alors qu'il s'apprête à vaquer à ses occupations, il est interpellé. Une jeune femme blanche, épuisée, vient d'arriver au village. Son voyage a été éprouvant et elle voudrait louer une chambre pour quelques nuits. Le religieux lui offre l'hospitalité. Elsie Appelbaum va pouvoir se reposer au presbytère, mais elle découvre qu'il lui manque un bagage, il a disparu ! On lui dit qu'il est peut-être tombé dans un ravin car une bête porteuse a été perdue au col d'Alhaquinboa... Elle n'en peut plus... Elle est venue de loin pour retrouver la trace de son mari archéologue disparu depuis plusieurs semaines... Pendant ce temps, les quatre Indiens qui attendaient devant les grilles déguerpissent. Ils savaient que cela ne servait à rien de patienter. Ils ne pourront pas venir en aide à l'une des leurs...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le duo de scénaristes qui avait signé L'âge d'or, Roxanne Moreil et Cyril Pedrosa, est aux commandes de cette nouvelle histoire, illustrée par Karine Bernadou (Les croqueuses, Tilda sur les toits). L'album est un véritable voyage onirique et chamanique, qui se déroule dans un village mexicain. Elsie est à la recherche de son mari archéologue porté disparu : elle arrive dans ces contrées en tant que femme blanche et découvre deux mondes : le peuple autochtone et les colons blancs d'origine espagnole qui ont pris la main sur ces lieux et qui dictent leurs lois, qui maltraitent les autochtones. Dans ce contexte, Elsie entame ses recherches pour retrouver l'amour de sa vie. Mais les souvenirs vont refaire surface : des souvenirs qu'elle avait oubliés, qu'elle avait enfouis. Son histoire d'amour n'était peut-être pas si rose que cela... La bande dessinée nous embarque avec Elsie dans un monde où le réel et l'imaginaire s'entrecroisent, où l'on se perd. L'ambiance est souvent pesante, oppressante... Et plus nous avançons, plus nous la ressentons. Le titre est prenant, féministe et engagé. Il est sublimé par la mise en images et en couleurs de Karine Bernadou. Elle opte pour un dessin libre et soigné, où les couleurs fluorescentes prennent le dessus, rayonnent tout en transparence. Une dénonciation de l'emprise, sous différentes formes, et du patriarcat, à travers un album saisissant, intrigant et différent. Celui-ci aurait pu être parfois un peu plus explicite dans la narration, mais il nous met à la place d'Elsie, qui se cherche, et qui va finir par assembler les différentes pièces du puzzle de sa mémoire, pour comprendre ce qu'il s'est réellement passé.