L'histoire :
A l’aube de la seconde guerre mondiale, Prague vit dans un climat inquiétant. D’autant plus pour la communauté juive qui voit en Hitler une menace plus que sérieuse. Le führer, qui défile dans les rues de la capitale tchèque, est vu comme le diable. Mais pour Coral, le diable est celui qui se tient à ses cotés depuis son enfance et que personne d’autre ne voit à part elle. Malgré cet ami (pas si) imaginaire encombrant, Coral vit sa vie de jeune fille et s’occupe de son père Gershon Loew, handicapé depuis l’exorcisme qu’il a pratiqué sur elle et à l’origine de ce compagnonnage infernal. Ancien Rabbin respecté, Loew était spécialisé dans les exorcismes et emmenait avec lui la petite Coral, traumatisée par les cris des possédés. Un jour qu’elle fut elle-même ensorcelée, son père parvint à soutirer le malin en elle, mais sa chute accidentelle interrompit le processus, liant à jamais le diable et Coral. Mais Lowe intéresse aussi une conjuration d’autres rabbins, voulant utiliser son sang pour ressusciter le Golem, monstre d’argile défenseur des juifs face à l’oppresseur.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En nous plongeant dans le folklore tchèque du début du siècle, l’auteur espagnol Jose Homs se donne un formidable terrain de jeu qui mélange l’histoire, l’ésotérisme et les légendes séculaires de la vieille Europe. Dessinateur hors pair ayant officié sur Millenium ou Shi, Jose Homs nous épate par son talent graphique empreint de références cinématographiques d’horreur, en passant par le milieu forain de Freaks (Tod Browning), la légende du Golem et ses multiples adaptations, sans oublier l’Exorciste (Friedkin) dont il reprend même l’iconique image du père Merrin devant la maison maudite. Le tout est diablement efficace et visuellement époustouflant, mais ne comble pas le manque d’intérêt pour l’intrigue principale de Coral et le diable. En effet, la multiplication des références a beau être plaisante (par exemple le mythe de la construction du pont Charles), elle noie le récit principal de cette relation faustienne inédite, qui en devient anecdotique. La difficulté est qu’en représentant physiquement une figure abstraite comme le Malin, on en perd toute la portée symbolique. Quand, par exemple, celui-ci se prend un gnon de la part du Golem, il en devient un personnage moins inquiétant, vulnérable et de fait moins intéressant. On ressort de cet album avec frustration, car même si visuellement Le Diable et Coral est un petit bijou, l’histoire est trop dispersée pour convaincre complétement.