L'histoire :
Alors que les cadavres momifiés continuent de troubler la capitale, l’enlèvement de Cinq-Fleurs impose une nouvelle urgence. Les deux enquêteurs – Serpent, haut fonctionnaire sans bras mais redoutable dans sa détermination, et Œil Lance, ancien guerrier devenu un chasseur de vérité – parcourent les terres de Tenochtitlan et ses alentours à la recherche d’une piste fragile. Or plus ils avancent, plus les liens entre religion, ambitions politiques et justice apparaissent troubles. L’affaire révèle des tensions internes qui dépassent largement la seule série de meurtres. Les deux enquêteurs comprennent que cette disparition n’est pas un incident isolé, mais l’un des symptômes d’un empire fragilisé par ses propres contradictions. Le temps joue contre eux, et chaque avancée ouvre sur de nouvelles zones d’ombre.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec ce quatrième opus, l’auteur-scénariste Hub donne un coup de projecteur cinglant sur les entrailles de l’empire aztèque. Là où les trois premiers tomes installaient l’atmosphère, les personnages et le mystère, Papillon-Tonnerre accélère le rythme, faisant monter la tension jusqu’à l’étouffement. L’intrigue, riche en faux-semblants et en enjeux politiques, ne ménage personne : le lecteur est pris dans un engrenage où chaque allié potentiel peut devenir menace, où chaque élément religieux, social ou personnel peut basculer dans la violence. Hub ne se contente pas de dérouler une enquête : il interroge le pouvoir, la caste, la corruption et la fragilité des institutions derrière le vernis d’un empire puissant. Tout converge vers une question morale : peut-on réellement croire en la justice dans un régime où la tradition, le sang et la politique s’emmêlent ? Parallèlement, ce tome 4 explore la violence des rites et le poids du sacré. La quête de vérité, dans un empire gangrené par la peur et le secret, peut coûter très cher. Graphiquement, Hub – qui assume aussi le dessin – confirme sa maîtrise. Le trait est sombre, dense, précis ; il sait rendre la pierre gravée, la peau momifiée, la sueur d’un couloir obscur. Chaque planche respire la poussière, l’encens, la pierre sculptée, la chaleur moite des jungles et des temples. Les décors foisonnent – marchés grouillants, palais sculptés, routes en terre – tout contribue à donner à l’univers une densité presque palpable. Le travail de couleur assuré par Li ajoute des teintes lourdes et chaudes : ocres, rouges profonds, bruns poussiéreux et ombres violacées, qui intensifient l’atmosphère inquiétante. Le contraste entre ombre et lumière fonctionne comme un souffle rythmé, entre menace et espoir. Le découpage, nerveux, sait doser les temps forts et les respirations : un zoom brutal sur un cadavre momifié, puis un plan large sur la cité ; un regard perdu, un silence chargé ; un procès de l’ombre, un dialogue feutré. Le rythme s’accélère lorsque la chasse s’intensifie, ralentit quand l’angoisse grandit ou quand le doute ronge les personnages. Cette alternance donne à la lecture un souffle haletant, en parfaite osmose avec le propos. Ce quatrième tome – et pénultième de la série – impose le sentiment d’une enquête lentement serrée, d’un ultimatum lancé à l’empire tout entier. Hub embarque ses personnages et son lecteur dans une spirale sombre, presque irrésistible. Si la trame demeure celle d’un thriller historique, l’intensité dramatique, l’âpreté des décors et le poids des secrets donnent à Papillon-Tonnerre une ampleur rare. Le dénouement final s’annonce d’ores et déjà comme un tremblement – et nul doute qu’il laissera des cicatrices.