L'histoire :
Jessica, Antoine et Bozo sont trois ados désœuvrés qui habitent sur la côte picarde du côté d’Ault, un coin très rural. Ils tuent le temps en jouant au foot, en fumant des roulées ou en zonant à rien foutre dans les dunes. Quand elle est seule, Jessica s’amuse à pisser comme un garçon. Elle baisse son pantalon de survêtement et pisse debout dans un ruisseau en pinçant son sexe… Soudain, elle entend le bruit d’une motocross, une Yamaha YZ250 qu’elle connaît bien. Elle se cache et suit le bruit sur quelques centaines de mètres. Dans un creux de prairie à flanc de falaises, elle découvre ainsi un bunker allemand, abandonné là depuis la seconde guerre mondiale. La moto est garée à côté. Par une petite ouverture, en se pliant en deux, Jessica pénètre discrètement à l’intérieur de ce bloc de béton arrondi, crado et tagué. Elle avance dans un couloir et jette un œil par une toute petite ouverture. Elle espionne alors un couple de jeunes du village qu’elle connaît bien, qui se roulent des pelles. Et puis la fille s’agenouille devant le garçon et lui baisse son pantalon… Jessica s’en va, un peu bouleversée. Elle retrouve ses potes de foot. Plus tard, elle les emmènera explorer ce nouveau lieu incroyable, où ils imagineront des trucs de guerre et parleront des poils de leurs quéquettes…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Une nouvelle génération d’auteurs de « BD sociale » émerge chez Dupuis, au sein d’une nouvelle collection Les ondes Marcinelle. Après la belge Clara Lodewick et son Merel, voici le picard Camille Poulie et son Bunker. Il nous invite à suivre des ados de la côte picarde, du côté d’Ault (Vimeu), qui trimbalent leur désœuvrement en survet’. A part jouer au foot, refaire leur coiffure ridicule avec du gel, se défier du regard et mesurer la taille de leur zob, ils n’ont pas grand-chose à faire de leurs journées… Ce bunker allemand de la seconde guerre qu’ils viennent de dénicher dans un vallon se révèle soudain un fabuleux terrain d’exploration et de fantasmes. Poulie ne met pas en place d’intrigue à proprement parler. Il place le lecteur dans un rôle de voyeur, de spectateur d’un quotidien un peu vide, culturellement parlant. Ce monolithe de béton sert aussi bien à se cacher pour se livrer à ses premiers émois de couple, mais aussi se réfugier pour imaginer une quête de fantasy dont-vous-êtes-le-héros. Il est aussi légitime de considérer la part métaphorique de ce Bunker, autour de l’enfermement dans une condition sociale sans issues. Poulie montre un trait en noir et blanc réaliste très abouti et stylisé, proche de la BD indé ou du fanzinat. Les contours suffisent parfois ; une fois plantés, les décors sont oubliés ; des trames de points ou de cercles concentriques sont ajoutées ; seuls les éléments indispensables sont dessinés, le reste est juste suggéré. Le résultat est un sentiment d’introspection puissant, le portrait juste et limpide d’une condition, façon Strip-Tease (l’émission de reportages de la RTBF).
