L'histoire :
Dans un futur proche et néanmoins post-apocalyptique, la montée des eaux a recouvert une bonne partie des plaines françaises. Les villes sont majoritairement noyées, insalubres, la société humaine est complètement déstructurée. Dans ce contexte, la vieille Jeanne a choisi de rester vivre à bord à la marge de la civilisation, à bord d’un radeau-péniche sur lequel elle cultive des herbes et des plantes. Jeanne tient à rester connectée à la nature, quoi qu’il en coûte. Mais ce jour-là, ce qu’elle redoutait depuis longtemps accoste le long de son ponton. Un yacht de la sécurité civile vient la recenser et la sommer de quitter son installation. L’objectif officiel de regrouper un maximum de monde dans des villes restaurées, est une raison sanitaire. Mais Jeanne sait bien que l’Etat cherche à contrôler la population. Mais plutôt que s’insurger et se rebeller, elle accueille les flics avec le sourire et leur offre… une tisane. Mais une tisane de sa confection, à base d’ergot de seigle qui a pour conséquence de faire perdre la boule à deux d’entre eux… L’un se dénude et met son caleçon sur la tête. L’autre se reconnecte à la nature en faisant un câlin à une vache. Le troisième est quelque peu décontenancé…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Il s’est déroulé 3 ans (une éternité !) entre le premier tome de L’âge d’eau et cette suite conclusive. On retrouve nos personnages attachants en roue (à aube) libre, à la marge d’une société d’anticipation qui prend l’eau. L’ambiance oscille toujours entre émerveillement et désespoir, entre une forme de spleen du post-apo et la lutte résignée contre un « système » qui tente toujours de contrôler la population. Benjamin Flao dresse en quelque sorte le portrait de son propre état d’âme sans illusion au sujet de nos déviances pollueuses incontrôlables. C’est désormais certain : la fin de l’anthropocène est programmée à court terme. Alors à quoi bon chercher à se « ranger » ? Autant vivre libre et libertaire, se reconnecter à la nature, retrouver le sens de l’essentiel. Alors certes, Flao part un peu dans tous les sens. On peine en effet à trouver une ligne directrice dans cette suite, rythmée façon patchwork – et ce désordre se situe pleinement dans le propos libertaire ! On suit les pensées et les rêves du chien (bleu !) (et télépathe !) ; on découvre les situations comiques entre Jeanne et les policiers ; on suit les tribulations anti-système de Vinee, la jeune punkette rebelle, sans trop piger où ça nous mène ; et bien sûr le road-trip maritime des deux frangins marginaux, philosophes et contemplatifs, qui se laissent porter par le courant. Evidemment, tout cela est somptueusement dessiné par Flao, grand artiste de bande dessinée, dont la griffe passe d’un réalisme absolu à un rough crado, dans des compositions toujours justes, sans que cela dérange le moins du monde.