L'histoire :
Jeanne d’Arc nait vers 1412 dans le village vosgien de Domrémy. Ses parents Jacques et Isabeau ont préalablement eu trois fils. Jeune fille, elle vaque aux besognes familiales de la maison et elle est très pieuse et fervente. Un jour, alors qu’elle a 16 ans, elle entend soudain la voix de Dieu qui lui enseigne de bien se conduire et de fréquenter l’Eglise. Et puis elle a une apparition de Saint Michel, accompagné de ses anges. Il lui semble qu’il est bel et bien devant elle, corporellement. Saint Michel lui dit qu’elle sera bientôt contactée par Sainte Catherine et Sainte Marguerite, et qu’elle devra agir en suivant leur conseil. Ces dernières disent à Jeanne d’aller trouver Robert de Beaudricourt (le capitaine de Vaucouleurs) afin qu’il baille des gens pour aller avec elle à la rencontre du roi de France, Charles VII. Il faut qu’elle parte de sa région sous le joug des anglo-bourguignons, sans le dire à son père, et qu’elle aille trouver Charles VII à Chinon, afin ensuite de lever le siège devant la cité d’Orléans. Dont acte : le 13 mai 1428, Jeanne reconnait immédiatement Robert de Baudricourt car la voix lui indique qui il est. Elle lui parle, mais Baudricourt n’accorde rien à cette pucelle sans expérience et il la renvoie chez ses parents…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Au fil des siècles, Jeanne d’Arc est devenue une figure emblématique de la nation française, l’icône de la patrie, au point d’être instrumentalisée par la droite nationaliste. Il existe d’innombrables versions de sa biographie – romans, ciné, BD – qui focalisent pour les unes sur sa dévotion, pour d’autres sur son hystérie guerrière… Et pourtant, il existe une vision primordiale, qui détaille factuellement sa vie, son incroyable engagement auprès des armées du roi pour bouter les anglais hors de France et le procès retors et truqué qui l’envoya au bûcher. Cette version, c’est la retranscription de l’intégralité de son procès, rédigé en 1431, qu’on trouve aujourd’hui à la Bibliothèque de France. Ce sont ces lignes certifiées et solennelles que Séverine Lambour adapte très sérieusement ici en scénario BD, via une écriture mâtinée de « vieux françois », tout de même lisible, pour les crayons de Benoît Springer. Or ce dernier prend le parti inverse d’un dessin caricatural à outrance, notamment concernant les traits des personnages : avec son visage poilu, boutonneux et plat de porcinet, ses dents du bonheur, sa morve et ses larmes qui coulent en d’épaisses gouttes, Jeanne est hideuse à souhait. Et l’évêque Cauchon qui la condamne finalement à mort ne vaut pas mieux. Pour autant, la soldatesque, les monuments et les nombreuses vues d’« animations » sont soignés et respectueux de l’époque. Ce traitement paradoxal est assurément un parti-pris qui adoucit l’austérité d’une retranscription verbeuse et détaillée de l’authentique « affaire » Jeanne d’Arc. Lors du procès final, on s’y perd certes quelque peu, tant celui-ci est retors et tourne en rond pendant des mois sur les aveux d’hérésie. Tels étaient les prémices de l’inquisition : iniques, implacables et politiques.
