L'histoire :
En juillet 2001, un châle sur la tête, Myriam, 19 ans, se rend à la gare de Toulouse dans un fort état de stress. Elle retire son alliance dans les toilettes publiques, elle a subitement décidé de changer de vie. 20 ans plus tard, elle participe au chargement d’un camion de déménagement à Paris. Son mari vient de perdre son boulot et il accepte de suivre sa femme, devenue Marie, dans son poste de journaliste à… Toulouse. Leur fille Lise n’est franchement pas ravie de quitter ses amies et sa vie parisienne. Elle râle en permanence, notamment quand elle perd la 5G, comme toute ado qui se respecte. Leur plus jeune fils Félix est déjà plus heureux, car à son école à Paris, il était victime de harcèlement scolaire. La famille traverse la France en camion, direction la vieille demeure familiale de Myriam aux allures de manoir hanté, qu’elle a racheté malgré son léger délabrement. A l’arrivée, tandis que les parents font un état des lieux des travaux à entreprendre, les enfants découvrent ces lieux qu’ils ne connaissent pas. Notamment au grenier, Félix ouvre un curieux coffre, fermé par une plaque métallique sur laquelle se trouvent des écritures en hébreux. Aussitôt, un poltergeist se produit : des objets tombent et volent au milieu d’une lueur bleue, et la maison entière subit une coupure d’électricité. A la lueur de son téléphone portable, Lise retrouve son frère avec un air coupable, mais normal. Elle s’empare d’un châle blanc qu’elle trouve joli et le met sur épaule pour descendre retrouver ses parents…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après tout, pourquoi n’y aurait-il que la religion catholique qui dût pâtir de possessions sataniques ? Les juifs ont aussi droit à leurs méchants démons ! Ce qui aboutit ici à un classique de l’horreur, maintes fois mis en scène au cinéma : un esprit malin s’empare du corps d’un être innocent et le pousse à commettre des crimes, ce qui nécessite un exorcisme afin qu’il soit enfermé ailleurs. Un classique, donc, mais sacrément bien séquencé dans cet album de 82 pages, pour en faire un page-turner qui s’avale d’une traite. Rompue à l’exercice des fictions télévisées, la scénariste Déborah Hadjej-Jarmon avait déjà déroulé une aventure fantastique étayée par la culture juive, avec le Golem de Paris en janvier 2025. Elle a décidément bien appris son catéchisme du 9ème art et déroule cette fois son intrigue sur deux époques, en mettant en scène une famille percluse de ses tracas ordinaires – recherche de boulot, éducation des gosses, adultères, secrets enfouis… Jusqu’à ce qu’un « dibbouk » s’empare de l’un d’eux et... c'est là que commencent les problèmes. La mère de famille définit ce qu’est un Dibbouk, en page 43, à destination du profane : « Chez les juifs superstitieux, c’est l’esprit d’une personne décédée qui habite le corps d’un individu auquel il reste attaché. Si le dibbouk n’est pas exorcisé, l’individu possédé peut mourir ». De son trait semi-réaliste légèrement stylisé et original, le dessinateur italien Alberto Zanon, ex chara-designer chez Disney, fournit un découpage et des cadrages idéaux pour faire monter le suspens de manière limpide et prenante. N’ouvrez jamais de coffre antique et gravé de mystérieux mots en hébreux dans le grenier sans savoir ce qu’il contient.