L'histoire :
Solomon est un vieil alcoolique acariâtre. Joe est un bouillonnant ingénu. Tout aussi jeune, Anna est nettement plus réfléchie, plus professionnelle. Tous trois sont agents fédéraux, relativement peu complices entre eux. Ils font néanmoins équipe pour mener à bien la résolution d’enquêtes sordides. Tout d’abord dans la petite ville de Salem, où la mort tragique et simultanée de 4 citoyens nécessite quelques éclairages. Officiellement, en l’espace d’une nuit, l’explosion d’une station service a tué une gamine et le pompiste, au moment où un vieux faisait une banale crise cardiaque et où un artiste se suicidait par immolation. Trop vite classés, ces décès sont suspects, tout comme la défiance pesante que font planer les habitants de la bourgade à l’encontre des trois coéquipiers… Une fois cette affaire résolue, les trois flics se plongent sur une autre enquête, aux accents tout aussi scabreux. Un célèbre avocat d’Atlantic City a été retrouvé empoisonné dans le bureau de sa luxueuse villa, à moitié nu devant son ordinateur. Les circonstances troubles de ce décès amènent les trois flics à s’intéresser aux relations qu’il entretenait avec sa femme et sa fillette de 11 ans…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si intégrale il y a (déjà), c‘est sans doute que la collaboration entre Richard Marazzano et Christian de Metter sur ce thriller psychologique est terminée. Triple hélas, l’association de ces deux excellents auteurs n’aura durée que le temps de deux albums : Pauvre Tom (paru en 2000) et Trois larmes pour Lucie (2002), aujourd’hui réunis. Le point commun entre les deux affaires : une plongée sordide dans les méandres complexes et retors de l’âme humaine. A la haine ordinaire d’une population déshumanisée (le tome 1), succède une affaire de pédophilie d’une rare abjection (tome 2). A chaque reprise, la narration de Richard Marazzano est dense et exquise. Sur les intrigues policières à proprement parler, le scénariste développe de fausses pistes fantastiques parallèles (exorcisme ? sorcellerie ?) auxquelles s’entrechoquent les personnalités complexes des enquêteurs. L’alcoolisme de Solomon, la patience tourmentée d’Anna, l’emportement de Joe… Subtiles, ces différents aspects prouvent une étude psychologique extrêmement fouillée des personnages. Or, la résolution des enquêtes en soi n’est pas simple non plus : il est à chaque fois difficile d’identifier où commence et où s’arrête la culpabilité des sujets. Sans doute la seconde intrigue est-elle plus convaincante que la première… Mais à chaque fois le travail graphique de Christian de Metter, une sorte de « réalisme impressionniste », est de haute volée. Ses crayonnés directement mis en couleurs au pinceau font de chaque case une mini-peinture de grand talent. Le résultat est plus ou moins percutant, mais un sentiment idoine de malaise s’en dégage assurément. Un bien bel ouvrage renfermant deux récits absolument poignants…
