L'histoire :
Le 17 juillet 1978, deux voitures ornées de deux drapeaux différents arrivent devant le Palais des Congrès dans la ville de Baguio City, aux Philippines. De la voiture rouge soviétique, sort le jeune champion d’échecs Anatoli Karpov, champion du monde en titre. De la voiture blanche suisse, sort Viktor Korchnoï, dissident et exilé politique, anciennement soviétique, qui défend désormais les couleurs de la Suisse. Enfin, d’une voiture noire officielle, sort le président dictateur Ferdinand Marcos, venu assister à la confrontation d’échecs que son pays à l’honneur d’accueillir. Dès son arrivée sur scène, pour la première partie, Korchnoï frise l’incident diplomatique. Il arrache le drapeau soviétique qu’on a mis de son côté de la table, pour le remplacer par un drapeau suisse. Le ton est donné : la confrontation sera surtout politique. La délégation soviétique est pléthorique : un colonel, le champion letton Maikhaïl Tal, mais aussi un parapsychologue, un cuisinier, un préparateur physique, un médecin, un attaché de presse, deux interprètes, six agents du KGB… Kortchnoï, est juste accompagné de sa future femme et de deux grands maîtres d’échecs anglais : Raymond Keen et Michael Stean. Tandis que le premier match commence dans une tension extrême, non loin du palais des congrès, un vieux prisonnier depuis 1945, Benjamin Faure-Rojo, emprisonné pour un triple homicide qu’il n’a pas commis, découvre avec stupeur l’évènement dans un article de presse…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dix ans après Monsieur Lévine, le catalan Toni Carbos adapte en BD le roman de Javier Cosnava, qui focalise sur une édition de championnats du monde d’échecs qui est restée dans la postérité. C’est authentique : en 1978, aux Philippines, le jeune champion soviétique Anatoli Karpov défendait son titre face à un ex-compatriote dissident désormais suisse, Viktor Korchnoï. Après des années de lutte de Korchnoï pour se libérer du carcan soviétique, les tensions politiques furent à leur paroxysme. La délégation soviétique comptait authentiquement des agents du KGB et un parapsychologue, qui cherchait à influencer la partie en faveur de Karpov ! Retransmise en public comme un grand évènement sportif, la confrontation a duré… 3 mois, en 32 parties très disputées et avec pas mal de retournements de situation. L’Histoire ne dit pas si la parapsychologie l’a réellement influencée… mais Karpov l’a remportée. Cosnava/Carbos alternent la retranscription de ce fameux match d’un autre arc narratif en thriller. Un vieux prisonnier, Benjamin Faure-Rojo, lui aussi joueur d’échecs, sort de taule pour accomplir sa vengeance. A vrai dire, les deux histoires s’entremêlent assez mal, en raison d’un découpage narratif peu fonctionnel, peu immersif et parfois confus. On ne se passionne vraiment ni pour la partie d’échec qui piétine, ni pour l’affaire Faure-Rojo, quelque peu alambiquée. C’est dommage, car à quelques pétouilles près, le dessin semi-réaliste est plutôt abouti, régulier et équilibré dans ses cadrages. Il est judicieusement complété par une colorisation qui fait dominer deux teintes majeures : bleu-gris foncé et rouge soviétique…