L'histoire :
Leonor de Salvatierra est la dernière née d’une lignée de « charra », des femmes sorcières au sein d’une communauté de gauchos féminines (cow-boys en Amérique du Sud). Comme l’exige la tradition, une goutte de sang a été versée alors qu’elle été bébé dans un champ labouré, pour lier son destin et ses sens à la terre. Bien des années plus tard, alors qu’elle est jeune adulte, lors d’une fête de village, la brune Leonor croise le regard d’Isabel d’Isla Perdida, la blonde, héritière d’un vaste domaine. Un regard dur et triste, mais envoûtant. Leonor la surprend un peu plus tard en train de pleurer au pied d’un arbre sur un îlot sur un terrain appartenant à sa famille. Isabel explique que c’est avec leurs larmes que son clan marque ses terres. Le lendemain, alors qu’elle s’occupe de charger du foin, Leonor se fait sermonner par sa mère : puisqu’elle est entrée sur un territoire appartenant aux Isla Perdida, Leonor devra travailler quelques temps pour ce clan afin de réparer l’offense. A peine surprise, Leonor accepte volontiers. Dès les premières heures, les deux femmes se toisent, mais lient un rapport d’amitié dans le travail… Mais ce lien qui se tisse dépasse largement l’amitié…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec ces Maudites, l’espagnole Carla Berrocal propose une aventure mutante, à la croisée des genres, des stéréotypes narratifs et des formats. Au premier abord, la couverture souple et la petite dimension s’inscrivent dans le modèle typique d’un manga… Mais la griffe de dessin très stylisée, géométrique et encrée, sur fonds de pages jaunes ( ! ) écarte cette histoire de gauchos 100% féminine de tous les canons esthétiques connus. Ce style est très original et sans doute pointu dans un registre indé/underground, à défaut parfois d’être lisible. Les personnages ont toutes des visages impassibles aux traits similaires… et entre macro-plans et courtes séquences psychédéliques, on ne distingue pas toujours ce que veut représenter l’autrice. L’histoire met en scène une tragédie (presque) classique emprunte de sororité, d’amour et de sorcellerie entre gauchos (les cow-boys argentins) dans une société uniquement féminine, elle-même inscrite aux frontières du fantastique. Car en marge de la relation intime entre la « charra » Leonor et la noble Isabel, qui rend leur amour impossible, il y a aussi des créatures fantastiques (et armées !) (et… masculines ?!) qui déciment les troupeaux et font peser une menace permanente. En quelque sorte, une variation de Roméo et Juliette entre lesbiennes amish, dans un monde décalé genré-westerné tout jaune. Bon, pourquoi pas.
