L'histoire :
Jin est une étudiante en art à Londres. Coréenne expatriée, elle entretient des relations très tendues avec son père. Sa dernière lubie ? Se promener vêtue d’une peau et d’un masque de gorille, qu’elle a dénichés aux puces. Sur le chemin de l’école, elle croise Edward, un sans-abri aussi courtois qu’excentrique, qui se prétend magicien. Bien que Jin soit convaincue que la magie est l’opposée de l’art et que tous les magiciens sont des menteurs, une amitié improbable naît entre eux. Ils se retrouvent régulièrement, au point que Jin finit par lui offrir son manteau en fourrure de gorille. Un jour, Edward lui annonce qu’il a enfin une chance de sortir de la rue grâce à un entretien d’embauche. Il lui demande alors de lui prêter 500 £ pour passer une nuit à l’hôtel, se doucher, et acheter un costume décent. Avant de partir, il lui donne rendez-vous une semaine plus tard, à l’endroit de première rencontre, pour la rembourser. Mais le jour venu, Jin assiste à une scène troublante : le corps sans vie d’un SDF portant le même chapeau qu’Edward, est emporté par les ambulanciers. Quelques jours plus tard, elle aperçoit une mystérieuse femme portant une peau de gorille étrangement similaire à celle qu’elle avait offerte à son ami…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec UK in a bad way, l’auteur signe une charge aussi brutale que pertinente contre les dérives de nos sociétés modernes. Surveillance généralisée, notamment via nos smartphones, fracture sociale béante, tout y passe, sans détour. Les riches s’amusent, les pauvres trinquent et le lecteur assiste, fasciné, à cette farce cruelle. Le récit est intelligent, engagé et s’autorise une certaine audace narrative. Mais cette audace a un prix. Les ellipses, parfois abruptes, rendent la lecture saccadée. Certains enchaînements déstabilisent, et l’on se surprend à relire certaines pages pour tenter de recoller les morceaux. Le propos n’en reste pas moins fort, mais une narration plus fluide aurait renforcé l’impact du récit. Graphiquement, c’est un coup de poing. Le noir et blanc domine, tranché par les trois couleurs primaires, rouge, bleu et jaune, utilisées avec parcimonie mais toujours à propos. Ce choix esthétique n’est pas qu’un effet de style, il appuie le propos et accentue les contrastes. Le tout baigne dans une identité visuelle résolument britannique, entre punk, désillusion et satire sociale. Un style brut, percutant, qui colle parfaitement à l’ambiance du récit.