L'histoire :
Le sergent Norman Bold attend à la gare de Berlin, à l’approche de Noël 1946. Il doit y accueillir Clarisse, la fille de son supérieur, une jeune femme élégante qui n’est autre que l’amante de son ami d’enfance JayJay. Mais depuis quelque temps, ce dernier s’est montré de plus en plus distant, aussi bien avec elle qu’avec Norman. Qu’importe, le sergent escorte Clarisse à travers les ruines de Berlin-Ouest jusqu’à JayJay, afin qu’ils puissent s’expliquer. En attendant, Norman sort son harmonica et entame Clair de lune de Debussy pour instaurer une atmosphère propice aux retrouvailles. C’est alors qu’un jeune homme famélique, vêtu de haillons et visiblement drogué, surgit des décombres. Sans un mot, il s’empare de l’instrument et se met à jouer du Bach avec une virtuosité saisissante, stupéfiant son petit public, avant de s’enfuir avec l’harmonica. Le lendemain, Norman et JayJay reprennent leur mission : retrouver et sauver les œuvres d’art rescapées des ruines. Ils font alors la connaissance du père Draganovic, un prêtre froid et amer, chargé de les assister dans leur tâche.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec Moonlight Express, le duo Smolderen/Clérisse, auteurs notamment de L’Été Diabolik, revient au polar pour livrer une fresque allant de Berlin à Los Angeles. On suit trois personnages liés par l’amitié et l’amour, mais brisés par les trahisons de l’après-guerre. Des années plus tard, ils décident de réclamer justice contre celui qui a volé leur innocence. L’album a pour fil rouge la musique, qu’elle soit classique ou jazz. Une playlist accompagne même la lecture, bien que son format ne soit pas des plus adaptés. Sur planches, en revanche, la représentation des sons est très réussie, les partitions s’élèvent et se déploient dans les décors dessinés par Clérisse. Et quand le jazz s’emballe, les dessins deviennent anguleux et géométriques, en perpétuel mouvement. Hélas, le scénario n’adopte pas la même énergie rythmée. Il avance de manière linéaire et sans véritable sursaut ou surprise, même s’il reste dense et suffisamment solide pour maintenir l’intérêt du lecteur. La véritable force du récit se situe dans le dessin. Avec son trait doux et coloré, Clérisse livre des planches élégantes et lisibles, qui traduisent avec subtilité le passage du temps dans les visages des protagonistes. Si l’album reste globalement sage sur le plan graphique, quelques séquences, notamment une session de jazz effrénée et une double page abstraite, viennent briser le cadre attendu.