L'histoire :
En des temps immémoriaux préhistoriques, emplis de dinosaures, de hautes montagnes et de forêts luxuriantes, une femme, Pas-d'Sein-Droit, est partie chasser en solitaire. Alors qu'elle fait une pause pour s'abreuver à un torrent, elle est surprise par un jeune vélociraptor. Bien que dangereuse, cette rencontre ne la panique pas. Pas-d'sein-droit extrait de sa gibecière un morceau de viande fraîche, qu'elle offre au dinosaure carnivore, comme pour le domestiquer. Le vélociraptor teinté de rouge sur le dos s'en contente et repart en criant. Pas-d'sein-droit, de son vrai nom Chemin-Droit, rejoint alors sa tribu, dans un village cerclé de hauts pieux pointus. Les guerrières de ce village exclusivement composé de femmes se préparent à une grande chasse. Sous l'égide de cette experte chasseuse, elles ont préparé un piège, une fissure. Mais avant cela, une guerrière massive, La Bosse, est fière d'exhiber la tête tranchée de Kindrah, une guerrière qui avait volé dans la réserve des nourrices. Les femmes se mettent alors en ordre de chasse. Leur objectif : un tricératops. Dans une vaste plaine, certaines entourent l'un des membres d'un troupeau plus lent que les autres et, munies de torches, elles l'isolent. Puis elles tentent de le repousser dans leur piège. Mais l'imposant pachyderme se rebelle et charge. Il encorne une guerrière, qui reste accrochée à sa tête. Puis il galope dans tous les sens, avant de tomber dans le piège tendu et de s'écraser en bas d'une falaise.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Étant donné qu'entre l'extinction des dinosaures et l'apparition de l'homo sapiens, il s'est déroulé un peu plus de 65 millions d'années (ce qui est beaucoup !), cette aventure préhistorique opposant une tribu de femmes et des dinosaures carnivores de type vélociraptors et tyrannosaures, appartient assurément au registre de la fantasy. Néanmoins cette confrontation est un bon vieux fantasme de scénariste, toujours réjouissant pour ceux qui apprécient les grosses bébêtes pleines de dents. Dans cet album comics épais et grand format proposé par les éditions Blueman, c'est ni plus ni moins que l'un des directeurs artistiques de Weta Workshop, le studio d'effets spéciaux de Peter Jackson – le réalisateur de la trilogie du Seigneur des anneaux et d'un King Kong – qui s'y colle, Greg Broadmore. Sa version de la préhistoire réécrite est un sommet sans doute inédit de violence farouche et gore. Les dinos croquent et déchiquètent les femmes dans des torrents d'hémoglobine et des giclées de viscères. Âmes sensibles s'abstenir. On se demande même si cette aventure animée exclusivement par des nanas hirsutes, boueuses et totalement dénuées de sex-appeal malgré leur nudité, ne serait pas, selon un prisme féministe, une forme de violence gratuite faites aux femmes. Souvent muette, pour laisser s'exprimer le spectaculaire du dessin, la narration de Broadmore est tantôt d'une redoutable efficacité – lors des nombreuses scènes de combats ou de fuites – tantôt nébuleuses, lors de pleines pages de décors sans transition. En soi, le scénario est certes un chouya basique, un prétexte au service du dessin. En gros : les cromagnonnes tentent de domestiquer certains dinos, pour qu'ils les protègent d'autres grands sauriens encore plus méchants. La technique infographique de l'auteur est alors redoutable et spectaculaire, avec des cases colorées riches, des décors exotiques fabuleux, des bestioles terriblement crédibles et une propension à verser sans filtre dans le gore. N'oublions pas qu'avant ses films grand public, Peter Jackson est aussi le réalisateur de Brain dead et Bad taste.
