L'histoire :
John Jones l’a échappé belle. L’explosion aurait pu le tuer. Au lieu de cela, le médecin proclame qu’il n’y a que quelques lésions à la tête. Il faudra bien-sûr surveiller tout cela mais normalement, tout va bien se passer. Il lui préconise deux semaines de repos et tout ira bien. Tout ira bien, c’est vite dit car Jones ressent malgré tout des pensées étranges : il se questionne sans arrêt sur les raisons des gens à agir tel qu’ils le font. Et puis, pourquoi voit-il toutes ses couleurs flashies ? Il faut sûrement qu’il s’occupe et quand il sort, il annonce la nouvelle à sa compagne Bridget : il reprend le travail dès le lendemain ! Elle ne comprend pas. Il vient à peine de se remettre d'une explosion qui a failli lui enlever la vie et il doit quand même aller travailler aussi vite ? Elle ne peut s’empêcher de pleurer dans ses bras. Elle est inquiète et leur fils réclame son père ! John reste imperturbable. Quand on est au FBI, on ne peut pas se permettre de rater un seul jour ! Et il a du boulot. A commencer par se renseigner sur ce fameux Mike Miller, le comprendre et comprendre son geste…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le projet Absolute, l’équivalent d’une refonte des personnages DC, continue cette fois avec l’étonnant personnage du Martian Manhunter. S’attaquer au personnage extraterrestre relève de la gageure tant le membre de la Ligue de Justice est particulier et énigmatique. Deniz Camp l’a bien compris et inverse le paradigme. Au lieu de transformer le super-héros de façon originale dans une histoire classique, c’est l’histoire qui devient originale au contact d’un personnage qui est tout sauf normal. Le récit est divisé en plusieurs parties et mime la tension permanente d’un humain, l’agent Jones, qui maîtrise mal son identité secrète et ses pouvoirs venus d’un autre monde. Cette difficulté devient sidération, le récit mimant les extrêmes entre raison et ailleurs, fantastique et policier, quotidien et irréel. La lecture se change petit à petit en lente déstructuration du propre objet que l’on lit dans une histoire exigeante et particulière, troublant voyage dans la psyché d’un homme qui est en fait un Alien. Chaque enquête est une prouesse technique, presque plus impressionnante encore que les missions du Martian Manhunter. Tournures de phrases, graphismes. Voilà les maitres mots des techniques utilisées. Un peu à la façon de Rimbaud ou des surréalistes, les textes de Camp sont des champs bruts de pensée, donnant des associations d’idées, des images et des métaphores déstabilisantes qui détruisent le réel comme pour mieux ouvrir le cerveau et ce qui s’y cache. La folie du texte s’accompagne d’un véritable jeu graphique. Javier Rodriguez livre des planches hallucinatoires où le réel côtoie le fantasmagorique, où les couleurs flashies envahissent le terne, où le grotesque caricature le beau. On y voit même des pages à placer derrière une lampe comme pour mieux dévoiler ce qui se cacher derrière l’apparence. Complexe, puissant, perturbant…