interview Comics

Herik Hanna

©Delcourt édition 2013

Quel est le point commun entre les collections 7, Le casse et La grande évasion, hormis son éditeur David Chauvel ? Réponse : il y a également un auteur qui a répondu présent au sein de chacune. Il s'agit d'Herik Hanna, un scénariste qui enchaîne les collaborations prestigieuses (Sean Phillips, Eric Canete, Trevor Hairsine), pour des albums aux qualités inattendues. En 2013, Hanna s'est aussi associé à Bruno Bessadi et Gaëtan Georges pour sortir Bad Ass, série inaugurale (quatre volets sont prévus) d'une nouvelle collection de... David Chauvel, mais au format US : Comics Fabric. De quoi vouloir connaître un peu mieux le prometteur Herik Hanna...

Réalisée en lien avec les albums Bad Ass T1, La Grande évasion T3
Lieu de l'interview : Le cyber espace

interview menée
par
8 janvier 2013

Bonjour Herik Hanna, peux-tu te présenter ?
Herik Hanna : Je suis arrivé très involontairement à la bande dessinée. Vers 15-16 ans, j'ai eu une petite machine à écrire dans la tête qui s'est mise à fonctionner. Je lisais un maximum de choses pour apprendre de nouvelles façons de narrer des histoires et j'ai eu un premier projet sérieux vers 17-18 ans avec la création d'un dossier de présentation. Je travaillais dessus avec un dessinateur débutant lui-aussi. On a fait nos premières armes dessus pendant un moment et lorsqu'on l'a présenté à Angoulême, on s'est bien planté. Après il y a eu d'autres ébauches, d'autres scénarios, et tout ça pendant 12 ans. En même temps, je pense que j'ai vendu tout ce qu'il était possible de vendre sur la planète, j'ai vendu du parquet, des chalets, des jouets... Cela me permettait de sponsoriser mes essais en BD. J'ai allié les 2 jusqu'à Angoulême 2005 où j'ai croisé Marini. Je lui ai demandé s'il avait de lire des projets de scénaristes non édités et comme il a été charmant et hyper sympa, il a accepté. Je lui ai fait parvenir un scénario qui s'appelait Stark, un polar noir. Il m'a répondu quelques mois après et m'en a dit du bien. Ce fut mon premier parrainage. Je l'ai recroisé à Angoulême et il y avait Fred Blanchard avec lui. Marini lui a conseillé de lire ce que je faisais pour Delcourt. Il a lui-même passé le bébé à David Chauvel qui cherchait des auteurs pour un nouveau projet. Plutôt que faire Stark, il m'a dit de faire un Casse.

Le Casse était-il un projet que tu avais déjà en tête ?
HH : Non, pas du tout David m'a mis le pied à l'étrier et m'a donné cette chance. C'est toujours un peu gonflé de laisser un débutant sur une collection pareille.

© T.Hairsine – Le casse, L'héritage du Kaiser – Delcourt

Tu as eu une liberté totale sur l'écriture du Casse ?
HH : Complètement. Il avait lu Stark et me faisait entièrement confiance. Je n'ai pas eu de consignes supplémentaires, j'ai essayé de faire quelque chose de différent car un casse implique certains éléments propres aux grands classiques du genre. J'ai essayé de contourner un peu le sujet avec un casse un peu planqué, les lecteurs savaient qu'il y en aurait un vu qu'il s'agissait du titre de la collection. Je voulais qu'on le découvre le plus tard possible. En cherchant un peu de documentation, j'ai vu que ça se tenait. J'ai essayé de mettre en place un jeu avec le lecteur, j'espère que ça a marché.

As-tu échangé avec ton dessinateur Trevor Hairsine ?
HH : Oui, oui, il est très sympa. C'est quelqu'un de très ouvert et avec qui, on a pu échanger par mails. On a fait ça durant toute la collaboration, c'était chouette.

Pour un premier album, tu as bénéficié d'un bon accueil ?
HH : Avoir Delcourt en premier éditeur, c'était déjà inespéré. Avoir son album dans une collection avec des artistes reconnus, c'était inespéré. Avec Trevoir Hairsine c'était inespéré. Avoir de bonnes critiques, c'était inespéré. Et pour couronner le tout, grâce à Trevor, on a été traduit aux USA dans un format comics. Pour un premier album, j'étais comblé. Merci tout le monde !

Ensuite, tu as enchainé avec 7 détectives...
HH : En fait, j'ai écrit Void 01 avant 7 détectives. David m'a proposé La grande évasion avant le 7. Je savais qu'il préparait la seconde saison de 7 et qu'il lui restait une place alors je lui ai demandé, pour une fois. J'ai essayé de lui sortir un synopsis rapide car je voulais absolument tenter d'avoir un album dans cette collection prestigieuse.

Que ce soit sur la grande évasion : Void 01 ou 7 détectives, tu travailles de nouveau avec des artistes anglo-saxons, rétrospectivement Sean Phillips et Eric Canete. Qui les a choisi ?
HH : A l'origine, je suis fan de comics depuis très longtemps. David le savait donc il m'a demandé si cela m'intéressait de travailler avec des artistes anglo-saxons qui sont souvent en rapport avec les comics. C'était une fois encore génial pour moi.

Comment présenterais-tu Void 01 aux lecteurs ?
HH : C'est l'histoire d'un vaisseau, le Goliath 01, qui est pris dans un champ d'astéroïdes. L'appareil est endommagé et l'équipage doit évacuer. Le responsable d'équipe est un peu tatillon et il ne supporte pas l'idée que l'on puisse abandonner son vaisseau. Il pète un câble et se met à massacrer son équipage. On suit alors le dernier survivant du massacre qui essaie de survivre à ce psychopathe qui hante les couloirs. C'est une sorte de chassé-croisé entre les deux.

© B.Bessadi – Bad Ass – Delcourt

Dans tes récits, tu sembles beaucoup d'inspirer du cinéma...
HH : Consciemment non. J'essaie de ne pas être proche de cela. Lorsque j'écris, j'ai le flash de la première page et ensuite j'écris la fin. Entre les deux, je laisse les personnages travailler tout seul. C'est beaucoup moins réfléchi. Si j'ai bien travaillé mes personnages, il me reste beaucoup de liberté entre le début et la fin.

Tu te lances en début d'année dans une nouvelle série Bad Ass avec Bruno Bessadi. Peux-tu nous en parler un petit peu ?
HH : Bad Ass.... C'est la chronique de Jack Parks qui est le souffre douleur de son lycée, c'est un type qui n'a rien pour lui, qui n'a pas de bol. On suit toute sa scolarité et en parallèle, on suit quelques heures un super vilain qui s'appelle Dead End. Le but est de joindre les deux bouts, savoir comment Jack Parks devient Dead End. Comment le souffre douleur du lycée devient un super vilain en puissance...

Cette fois-ci, tu te lances dans un projet de comics à la française avec un français aux dessins : Bruno Bessadi. Comment s'est passé votre collaboration ?
HH : Je travaille toujours mes scénarios en amont et mes dialogues notamment. Je fais très attention au rythme de lecture. Je lui ai envoyé le scénario et il s'est très vite être l'homme de la situation. Je pensais avoir beaucoup d'attente et comme il est lui aussi fan de comics, on se complète. Idem pour le coloriste Gaëtan Georges. C'est génial d'avoir des collaborateurs qui sont aussi exigeants que vous-même.

© B.Bessadi – Bad Ass – Delcourt

La série devrait faire 4 tomes....
HH : Que j'ai écrit déjà.

Quelles sont tes références ?
HH : Je ne sais pas toujours quoi répondre à cette question. Je m'intéresse à tout donc... C'est pas évident. Je n'ai pas de maître à penser, j'essaie de m'émanciper de références absolues. Évidemment, j'adore Jeph Loeb, Moore, Miller. J'adore Jaoui et Bacri aussi.

As-tu eu des coups de cœur en BD récemment ?
HH : J'ai découvert le grand arc de Geoff Johns sur Green Lantern. J'étais passé à côté pendant des années. Je me les suis tous fait d'un coup et j'ai trouvé ça super.

© E.Canete – 7 détectives – Delcourt

Quels sont tes prochains projets ?
HH : Chronologiquement, j'ai le quatrième tome de WW.2, la collection de Dargaud qui sort en 2013 avec un dessinateur espagnol qui a bossé pour Marvel. J'ai aussi Blind dog rhapsody qui est une parodie de shonen, un peu comme Bad Ass mais avec un humour plus présent, plus stupide encore. En suite, 7 détectives se décline en série. Cela s'appellera Détective tout court avec chaque album son détective. Ce sera avec Sylvain Guinebaud aux dessins. J'ai un projet secret mais je ne peux logiquement rien dire. Et puis évidemment la suite de Bad Ass.

Si je t'offrais le pouvoir d'aller visiter le crâne d'un autre auteur pour en comprendre son génie, qui choisirais-tu ?
HH : Je vais faire un mini-hors sujet avant de répondre. Quand j'étais plus jeune, j'étais guitariste dans un groupe de rock et je rêvais de jouer comme Satriani. Je me disais que si en claquant des doigts, je pouvais avoir le talent de Satriani, ce sera excellent. Depuis, je me suis rendu compte que c'était plus marrant en apprenant par soit-même. Quitte à rester crétin, ce ne sera pas un pouvoir qui me sera utile. Je préfère continuer à m'arracher les cheveux pour écrire mes albums.

Merci Herik !

© S.Phillips – VOID01 – Delcourt