parution 14 mai 2014  éditeur Casterman  Public ado / adulte  Mots clés Chronique sociale

Carnation

A la fin des années 90, Xavier Mussat, dessinateur de profession, vivait une relation sentimentale torturée avec une dénommée Sylvia. Un récit autobiographique passionnant, fruit d'une longue maturité et d'une sacrée expérience.


Carnation, bd chez Casterman de Mussat
  • Notre note Yellow Star Yellow Star Yellow Star Yellow Star

    CHEF D'ŒUVRE   Green Star Green Star Green Star Green Star

    TRÈS BON   Green Star Green Star Green Star Dark Star

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    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • Scénario Yellow Star Yellow Star Yellow Star Yellow Star

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    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • dessin Yellow Star Yellow Star Yellow Star Grey Star

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©Casterman édition 2014

L'histoire :

En août 2006, après avoir passé 16 ans à Angoulême, Xavier Mussat décide de rejoindre Paris. Il confie à un vautour – un oiseau qui bouffe les morts, quelle métaphore ! – qu'il va en profiter pour raconter en BD son histoire passée avec Sylvia. Il débute son récit par 1993, l'année de son diplôme en arts graphiques. Il était resté par confort dans la capitale des Charentes, en tant qu'ouvrier dans le dessin animé. Il avait rencontré Alice, une mère au foyer un peu paumé, sa première « relation toxique ». Alice le faisait tourner en bourrique, se servait de lui et de ses largesses, pour finalement le laisser progressivement tomber après avoir trouvé un nouveau job sur Paris. Xavier lui-même prenait du galon – et un meilleur salaire ! – grâce à un certain Michel Ocelot et à son projet de dessin animé Kirikou et la sorcière. A la même époque, Xavier renouait avec son père, avec lequel il avait quasiment rompu tout contact depuis le divorce de ses parents. Puis à la fin de Kirikou, Xavier prenait conscience de ses exigences artistiques et renonçait de continuer au sein du même studio de production, qui s'orientait de plus en plus vers des projets 3D « bas de gamme ». Il retombait alors dans une simili précarité. C'est vers cette période d'errance, de remise en question et de prise de conscience de la médiocrité de la société, que Xavier devait rencontrer Sylvia dans un bar. Son attitude, un peu provoc' et craintive à la fois, l'avait immédiatement séduit...

Ce qu'on en pense sur la planète BD :

Et oui, une nouvelle fois, un auteur se raconte en BD, et sur pas moins de 240 planches. Cependant, on accepte d'autant mieux l'intention autobiographique de la part de Xavier Mussat, qu'il a été en 1994 l'un des fondateurs d'une maison d'éditions dédiée à ce registre, Ego comme X. Simplement, cet auteur est peu prolifique et il place donc ce Carnation, fruit d'un travail graphico-narratif personnel de 10 ans, à contre-courant de pléthore d'ouvrages complaisants quant à l'épluchage de la matière-première de soi-même. La vocation catharsique est donc pleinement assumée, maturée et elle ne manquera néanmoins pas se soulever, dans un premier temps, l'agacement du lecteur rompu à cet exercice de chronique sociale devenu d'une grande banalité sur le marché du 9ème art. Mussat choisit ici de revenir sur son histoire sentimentale et psychologique avec une certaine Sylvia (un prénom modifié, par souci éthique). Cette « relation toxique » devait se nouer vers la fin des années 90 à Angoulême, où il vivait. Ce recul sain, associé au pédigrée de l'auteur, incitent grandement à la confiance. Mussat prend non seulement la distance, mais il met aussi plus de cinquante pages avant de s'attaquer à son sujet, afin de bien planter le contexte professionnel et psychologique. Dès lors, selon une bête trame chronologique, il ne semble pas dissimuler grand-chose de cette relation cannibale – au sens psychologique du terme – qui trouve tout son sens dans son titre, Carnation. Malgré la plage temporelle étendue nécessaire à la réalisation du bouquin, le dessin semi-réaliste demeure relativement cohérent. Il passe toutefois par différents styles, répartis au gré de moult métaphores graphiques et images-concepts pour traduire ses introspections mentales, dont une bonne part échapperont à l'intellect du quidam (une relecture est envisageable...). Au fil de la lecture, on constate aussi que si le nombrilisme et l'exorcisme sont les vocations premières du bouquin, ils ne constituent pas à eux seuls son propos. Mussat tire le lecteur vers le haut, l'incitant, démonstrations sincères à l'appui, à se poser moult questions sur les rapports humains, le phagocytage psychologique, la propriété de l'autre... C'est finalement passionnant, et pas que pour Mussat.

voir la fiche officielle ISBN 9782203087767