L'histoire :
Doigts déformés par l’arthrose, petits tracas du quotidien et surtout solitude, rendent Anita de plus en plus souvent acariâtre. Elle tente cependant de faire disparaitre ces humeurs en allant traquer étrilles et bigorneaux en ce jour de grande marée. La petite Lilou a eu la même idée, avec le même objectif : éloigner, pour un temps, les soucis. Pour elle, c’est l’hospitalisation de sa maman et par conséquence l’indisponibilité de son papa qui la font se sentir désespérément seule. Le hasard de la pêche les fait se rencontrer. Après une entrée en matière plutôt difficile, Lilou et Anita semblent pas trop mal s’entendre : on dirait presque deux amies qui ne se sont pas vues depuis longtemps. Au moment où elles décident de rentrer, cependant, en posant les pieds dans une flaque d’eau, elles font une chute vertigineuse au travers. Comme absorbées dans un univers étrange, elles se retrouvent sur le dos de créatures gigantesques mi-oiseaux, mi-dragons. Séparée de Lilou dans l’aventure, Anita est déposée sur un rivage. Elle y rencontre un drôle de petit lutin qui a pour mission de récupérer des livres de vie. Mais il n’arrive pas à mettre la main sur celui d’Anita…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans la mythologie grecque, Ananké est la personnification de la destinée, de l’inéluctable fatalité. En somme celle qui a déjà tout écrit et réserve à l’Homme peu de chance d’influer sur ce qui a été décidé. Pourtant la petite Lilou et la gentille frimousse ridée d’Anita s’évertuent ici à démontrer le contraire. Dans ce petit conte fantastique, en effet, elles nous laissent entrevoir qu’en unissant nos forces, à grand renfort de solidarité, on peut décidemment tout. Et pour elles, qui plus est, l’enjeu est de taille : la mort semble penser qu’il est temps de venir jouer les troubles fêtes dans leur vie. Pour faire passer le message, le scénario utilise la métaphore du voyage fantastico-initiatique avec rencontres étranges, créatures, mystères et heureuse conclusion. Réservée à un jeune public, l’intrigue est simplifiée à l’extrême, sans réels sursauts dans le déroulement du scénario. Or, plus que cette linéarité du récit, on regrettera que les deux héroïnes ne réussissent jamais à provoquer notre attachement : leurs sentiments demeurent malheureusement fadement traités. Du coup on n’est jamais réellement touché : hormis les dernières planches, on cherche en vain l’émotion (pourtant le sujet et le choix des protagonistes s’y prêtaient allégrement). Erwin Madrid livre un travail lisse et propre. Un boulot peut-être rendu un peu froid par son traitement informatique, mais sans conteste prompt à faire friser l’œil du public ciblé. En tous cas, il se révèle parfaitement efficace pour faire vivre cet univers particulier. Un album joli-mignon, qu’on aurait souhaité néanmoins plus touchant.
