L'histoire :
Camille, une jeune fille qui vit en Suisse, s’entraîne dur pour skier. Un été, ses parents l’envoient chez son grand-père, car ils doivent se retrouver seuls pour parler de leurs problèmes. Aymond, le grand-père, vit dans un chalet en altitude en Mayen. Camille n’est pas contente de devoir partir pendant cinq semaines avec ce grand-père qu’elle connaît à peine. En plus, elle sent que son père refuse d’entendre parler de ce dernier, pour une raison obscure. Pourtant, ces vacances vont la surprendre. Aymond élève de magnifiques vaches d’Hérens et il inculque à Camille les bases du métier d’éleveur. Le jeune fille est particulièrement fascinée par une vache sauvage et récalcitrante : la Baronne. Camille se plait dans cette vie et le temps passe beaucoup plus vite qu’elle ne l’aurait cru. De retour chez elle, la lycéenne n’est plus du tout à ce qu’elle fait. L’école et le ski ne l’intéressent plus : elle ne va pas aux entraînements et ses notes baissent. Elle ne veut qu’une chose : rentrer le week-end chez son grand-père pour voir les vaches. D’autant qu’à l’automne, Aymond réserve une belle surprise à sa petite-fille. La baronne est prête à vêler : Camille assiste à la mise à bas d’un petit veau ! Son grand-père lui annonce que ce veau sera le sien…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans la droite ligne des albums réalistes tels que Jo ou No Limits, Derib revient avec un nouvel album profond et intimiste. Tu seras reine révèle en effet la passion de Derib pour… les vaches ! Pas n’importe quelles vaches, toutefois : les vaches d’Hérens, de la race puissante et musculeuse des Alpages. Comme l’explique Derib lui-même en préface, elles ont bercé son enfance (lui-même étant Suisse). Cette étrange fascination s’explique aisément quand on regarde les premières pages de l’album : dans des croquis à l’aquarelle, Derib magnifie l’animal, subtil alliage de douceur et de force, de noblesse et de calme serein. Un amoureux de la nature n’aurait pu passer à côté de cet animal si fascinant et si proche des bisons. Il n’est certes pas question de western ici, mais Derib revient facilement vers ses premiers amours. Camille, à la peau métis et aux cheveux longs, ressemble étrangement à Chinook de Buddy Longway. La plaine et le désert sont remplacés par la montagne, toute aussi belle et sauvage. Aymond est le cow-boy des temps modernes : solitaire et amoureux de la nature, il n’a de cesse de s’occuper de son bétail. Derib s’ancre dans le récit réaliste et contemporain en prenant l’exemple d’une jeune ado bien de son temps, passionnée de ski, I-phone vissé aux oreilles et mentalité rebelle. Pourtant, face à la beauté de la montagne et au calme olympien des vaches, Camille va petit à petit se détacher des vanités terrestres pour se consacrer uniquement à ces animaux et à la nature. Maître consommé de la narration, Derib a l’art de rendre une histoire simple intéressante, belle et sans artifice, pleine d’enseignements sans être moralisatrice. Par-dessus tout, son humanisme fait sa force : Camille trouve son équilibre intérieur grâce aux bêtes et elle favorise les relations entre chaque membre de sa famille. Avec un mélange de pudeur et de sentiments dévoilés, Derib nous donne à voir la vraie nature humaine : celle qui aime son prochain et qui retrouve les vraies valeurs de la nature et de la vie. Le dessin, même un peu figé par rapport à la période Buddy Longway, demeure impressionnant. Notamment quand Derib s’attaque à la montagne sous toutes ses coutures et en toutes saisons. Sans oublier les remarquables aquarelles de début et de fin d’album, superbe hymne à l’amour de l’animal et de la vie.
