interview Comics

Neal Adams

©Urban Comics édition 2019

Neal Adams ! Un nom qui résonne aussi fort que les plus grands artistes et pionniers des comics. Génial dessinateur des plus grandes séries, il a marqué les esprits avec un Batman incroyable de vie et de beauté, un Green Lantern mémorable ainsi qu’un puissant Green Arrow, tout cela avec la collaboration fructueuse de Dennis O’Neil ! Il passe ensuite du côté de Marvel (après avoir dessiné le fameux Superman VS. Muhammad Ali) et travaille avec l’inévitable Stan Lee sur des run marquants de X-Men ou Thor. Multi récompensé, Neal Adams a en plus œuvré pour défendre les artistes américains. Nous avons eu la chance de rencontrer ce monument au Comic Con de Paris. Une interview courte mais sans concession où Neal envoie des punchlines dignes des combats de Batman !

Réalisée en lien avec l'album Batman, la légende T1
Lieu de l'interview : Comic Con à Paris

interview menée
par
11 janvier 2019

Bonjour Neal Adams. Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs ?
Neal Adams : Qui suis- je ? A vous me dire qui je suis... Peut- être un artiste. Un auteur aussi ok. Je suis un créateur de comics. J’ai travaillé sur Batman, X men, Superman. Je fais tous les trucs merdiques qu´on a aux Etats- Unis et qu´on n´aime pas ici en France.

Vous avez beaucoup travaillé avec Dennis O´Neil. Est- ce que c´était votre collaboration préférée avec lui ?
NA : J´aime bien travailler avec moi-même. Je pense que si vous versez de la peinture rouge sur la tête de Dennis O´Neil, il deviendra le « Red Skull » (Crâne Rouge). Vous connaissez le « Red Skull » ?

Vous avez changé Batman avec votre style…
NA : Je comprends qu´on pense que je l´ai fait. Mais, j'ai créé le même Batman que Jerry Robinson et Bob Kane ont fait. Mais je l’ai dessiné de meilleure façon. Et en quelque sorte, les gens pensent que si je le dessine mieux cela veut dire que je l´ai changé mais je ne l´ai pas vraiment changé. Il reste le même Batman qu´il a toujours été. Les gens qui l’ont changé lui ont mis une ceinture autour de la taille en référence à la 2ème guerre mondiale, ce qui est un peu stupide. Ou ils lui ont mis une armure lourde. Ce sont eux qui le changent. Mais moi, je ne change pas Batman. Je reste avec le même Batman. Donc, quand moi je dessine Batman, la seule différence c´est que je le dessine mieux. Et l´idée d´avoir des meilleurs artistes, plus professionnels et mieux formés, semble faire la différence. Car si on revient en arrière à l´époque des premiers comics, la plupart des artistes étaient des adolescents qu´on a trouvés dans la rue avec des portfolios terribles. Ils savaient à peu près bien dessiner, mais jusqu´à une certaine limite. A partir du moment où on commence à payer quelqu´un avec un peu d´argent, ils arrêtent de progresser. Moi, je suis un artiste formé et j´ai fait beaucoup de choses différentes, donc j´essaie toujours de tenter de dessiner mieux. Et les gens, ils vont regarder les dessins et ils se disent : « Wow, ça c´est différent ». Mais non, ce n´est pas le cas. Ce n´est vraiment pas différent du tout. Ça reste le même Batman qu´on a toujours connu. Il est athlétique, il porte un costume. Il y a d´autre gens par exemple qui le dessinent avec des chaussures de combat, vous savez avec des piques au-dessus. Comment un mec qui est athlétique peut porter des chaussures de combat ? Cela n’a aucun sens. Il pourrait porter des bottes de Ninja parce qu´il est souple mais il ne devrait pas porter des bottes de combat. Ça, c´est vraiment ridicule. Donc, il ne devrait pas porter de ceinture ni de bottes de combat ni une armure lourde. Moi, je ne le fais pas. Je le dessine comme un athlète : quelqu´un qui a une taille fine, qui peut faire des choses athlétiques et faire du Judo et des arts martiaux. Si vous êtes capable de faire des arts martiaux, vous ne pouvez pas porter des bottes de combat. Cela n’a vraiment pas de sens.

Comment s´est passé votre collaboration avec Stan Lee ? C´était facile de travailler avec lui ?
NA : Stan Lee a fait son boulot et moi, j´ai fait le mien. Il faut comprendre que les artistes, quelquefois, ont du ressentiment envers les scénaristes car ils pensent que l´auteur a moins de travail à faire qu´eux. En fait, c´est la vérité. Les scénaristes passent moins de temps en travaillant. On peut écrire un comics en un seul week-end mais ça prend un mois entier pour le dessiner. Donc, quelques personnes sont rancunières. Pas moi. Je suis un artiste professionnel. Je sais exactement ce qu´est son travail à lui et ce qu’est le mien. Et son travail à lui c´est de commencer et écrire un comics et croire que moi je vais dessiner l’histoire qu´il a écrite. Lui n’est pas obligé d´écrire tous ces extras et les compositions, comme si j’étais trop stupide pour pouvoir le comprendre. Il peut donc effacer toutes ces compositions de mise en page et se concentrer sur les dialogues et le contenu. Mon travail c´est lui donner la confiance que je dessine exactement l´histoire qu´il écrit. Ainsi, il peut se détendre et créer cette histoire. Si vous parlez à Dennis O ´Neil, il va vous dire exactement la même chose. Il est confortable de travailler avec moi parce qu´il ne doit pas tout m´expliquer. Je le comprends. Donc, lui, il peut se concentrer sur l´écriture de l´histoire. Mon travail avec Dennis O´Neil était un véritable plaisir car lui, il fait sa part et moi je fais la mienne. C´est comme si moi je faisais l´écriture que ça soit pour un autre artiste ou pour moi-même : il n´y a personne qui me dérange sur ce point. Il faut absolument être professionnel. Et cela c´est quelque chose qui est venu dans le monde des comics : on a plus de gens aujourd´hui qui sont professionnels donc à la fin, on a un meilleur produit malgré tout ce que certaines personnes disent...

Merci Neal et merci à Romy pour la traduction !


Neal Adams, en interview pour Planetebd